0.1 – Budget supplémentaire 2024 du budget principal / Rapport n° DFCG/2024/252
Vote Contre – Intervention de Céline Scavennec
Le groupe écologiste n’avait pas voté le budget primitif 2024, inutile de vous dire que nous ne voterons pas plus ce budget supplémentaire, ainsi que les budgets annexes qui en découlent directement.
Pour les mêmes raisons, que je peux rappeler brièvement, et pour d’autres raisons sur lesquelles je voudrais insister plus précisément.
Notre principal grief à l’égard de la politique budgétaire de notre département, est qu’elle ne tient pas compte de l’évolution du monde dans lequel nous vivons, en particulier sur le plan écologique et sur le plan social. Du coup, les budgets se suivent et se ressemblent chaque année, au motif que nous sommes dans un contexte contraint : peu de marges de manœuvre, pas de fiscalité directe, des recettes en baisse (qu’elles proviennent de la fiscalité via les DMTO, ou des dotations de l’État qui ne suivent pas l’inflation) et nous devons faire avec des dépenses obligatoires imposées par la loi pour la mise en œuvre de nos politiques sociales au service des nordistes (le RSA, l’APA, la PCH, etc.)
Certes.
Mais c’est la même chose dans les autres départements, et pourtant ailleurs en France des choix différents sont opérés devant à ces difficultés.
Un exemple de choix courageux que nous soutenons, et nous vous en avions déjà fait part, c’est la voirie départementale. Compétence historique peut-on dire de l’institution départementale. Le Département d’Ille et Vilaine a décidé au début de ce mandat de ne plus investir dans la construction de nouvelles routes, d’autres départements emboîtent le pas désormais. Les routes existantes sont rénovées, entretenues pour des raisons de sécurité routière évidemment, améliorées pour développer les liaisons cyclables ou le covoiturage. Mais pas d’investissements extrêmement coûteux dans des nouvelles voiries. Cela permet d’orienter l’investissement ailleurs.
Au fond, pour le Nord ce serait du bon sens. Notre territoire a connu l’industrialisation depuis 2 siècles et le département a soutenu son développement économique par des routes pour permettre de connecter les industries, les entreprises, les villes. Aujourd’hui, en 2024, ce maillage existe, il fonctionne et si vous estimez absolument indispensable de construire de nouvelles voiries départementales c’est qu’il y a un problème dans l’aménagement économique du territoire. Si l’industrie a déserté certains endroits, il n’empêche que ces secteurs restent bien desservis et c’est là que de nouvelles entreprises devraient s’implanter plutôt que de faire sortir de terres agricoles de nouvelles zones d’activité. Les infrastructures comme le contournement Nord de Valenciennes et celui de Maubeuge illustrent parfaitement mon propos.
Par ailleurs, les inondations de l’hiver dernier en Flandre et la nécessité de réparer les voiries impactées par ce phénomène climatique qui va se reproduire, nous le savons, devraient nous amener à être plus vigilants sur l’artificialisation des sols.
On ne peut plus continuer comme avant.
Sur le budget supplémentaire que vous nous proposez aujourd’hui, quelques remarques :
1. D’abord, il y a cette distinction que vous proposez entre les compétences obligatoires et le reste, le « facultatif » ou le « volontariste ». L’obligatoire, ce serait ce que l’État nous oblige à verser avec des barèmes précis et le « volontariste » c’est ce qu’on ferait en plus ou en mieux.
Non seulement nous contestons cette distinction et nous refusons de rentrer dans cette grille d’analyse quand vous considérez que l’aide sociale à l’enfance serait du « volontarisme ». Il n’y a pas assez de places d’accueil dans le Nord pour les enfants placés, parce qu’on en a trop supprimé et nous sommes dans le rattrapage, ce n’est pas « volontariste », c’est le minimum qu’on puisse faire sur le plan quantitatif. Et si on veut vraiment accueillir ces enfants correctement dont le Département est responsable, les aider à grandir et réparer les plaies béantes qui les ont amenés là, il faut aussi mettre des moyens supplémentaires sur le plan qualitatif : plus d’éducateurs, plus de psychologues, plus de soutien à la parentalité. Là encore, ce n’est pas du « volontarisme », c’est le minimum attendu à l’égard de notre institution.
2. Autre exemple de politique « volontariste » que vous mettez en avant : la rallonge budgétaire dans ce budget supplémentaire pour le Contrat à Impact social (CIS). Cela effectivement c’est « volontariste » ! Parce qu’il faut être vraiment très volontaire pour mettre autant d’argent dans un dispositif si coûteux, dont on n’a toujours pas pu évaluer l’efficacité.
3. Enfin, il y a le reste, le « facultatif » qui trinque, les politiques publiques sacrifiées au nom de leur caractère non obligatoire : la culture, l’éducation, l’environnement. La voie est déjà tracée dès 2024 et nous prépare évidemment au budget 2025.
Faut-il s’y résoudre ? Nous voyons bien que nous avons atteint les limites de ce modèle de fiscalité locale, comme cela a été souligné par Charles Beauchamps. C’est pourquoi il faut remettre la fiscalité locale dans un débat plus global sur la justice fiscale. Et à cet égard, nous soutenons les mesures du Manifeste fiscal juste de l’ONG OXFAM. Si le seul horizon de nos débats est de discuter de ce qu’on devra sacrifier pour assurer des missions obligatoires pour le compte de l’Etat, à quoi servons-nous ? L’Etat ne va pas nous sauver, car si les finances des collectivités sont mal en point, celles de l’Etat le sont encore plus.
Faut-il attendre quelque chose du gouvernement Barnier ? Nous ne doutons pas que les deux ministres issus de ces bancs connaissent parfaitement la situation du Département du Nord et aurons à cœur de le défendre. Monsieur Christophe est désormais ministre de l’Autonomie, Madame Létard a présidé il y a 2 ans notre Mission d’information et d’évaluation (MIE) sur l’APA, et indéniablement la politique de l’autonomie, de la dépendance, du vieillissement de la population demande des changements radicaux. Nous attendons une loi Grand Âge depuis 2017 ! Promesse du candidat Macron pour son premier mandat. Nous attendons aussi une sortie de la crise des Ehpad qui occupe l’actualité depuis des années et révèle des situations indignes. Des discussions parlementaires évoquent l’hypothèse de fusion du secteur soin et du secteur dépendance avec une expérimentation possible dans 20 départements, y serons-nous Monsieur le Président ?
Plus globalement, j’aimerais vous interroger, Monsieur le Président, au delà de ce budget supplémentaire sur les positions que vous allez porter au nom de notre département aux prochaines Assises nationales des départements de France.