0.1 – Budget principal – Budget supplémentaire 2025 Rapport n° DFCG/2025/290 – Vote contre
Intervention de Laurent Périn
Monsieur le président,
Monsieur le vice-président,
Cher.es collègues,
Vous nous présentez aujourd’hui le Budget Supplémentaire 2025, un budget supplémentaire technique, car vous vous contentez d’ajuster à la hausse les recettes de 20 millions d’euros, et surtout vous financez uniquement de nouvelles dépenses d’action sociale à hauteur de 4,5 millions d’euros. Un budget supplémentaire sans ambition dans la droite ligne du budget primitif.
Un budget supplémentaire révélateur de l’absence de marge de manœuvre financière du Département mais aussi d’un manque de dynamisme, de capacité à anticiper.
Pour autant, le département du Nord aurait matière à développer un certain nombre de politiques dans ses compétences :
Pour la jeunesse par exemple : le dernier baromètre de la pauvreté et de la précarité du Secours populaire rappelle que la jeunesse du Nord est surexposée à la pauvreté : le Nord est le premier département en nombre de jeunes (avec 520 000 de 15-29 ans), près d’un 1/3 d’entre eux vit sous le seuil de pauvreté (29,7% contre 22% au niveau national) ; 30,4% des 15-24 ans sont au chômage (contre 23% en moyenne au niveau national).
Près d’un jeune sur deux a rencontré des difficultés pour se procurer une alimentation saine et équilibrée », indique l’étude. Les étudiant.e.s sont aussi en grande difficulté : 60% d’entre eux ont un travail rémunéré ou en cherchent un.
« La détérioration de la santé est à la fois l’une des causes et des conséquences de la précarité », poursuit le Secours populaire. 40% des jeunes Français.e.s déclarent avoir des difficultés à accéder au système de santé en 2025.
En matière de santé mentale, tous les indicateurs se détériorent dans le département du Nord. Le taux de tentatives de suicide y a notamment été multiplié par 1,6 chez les 12-18 ans. Le département propose 21 psychiatres pour 100 000 habitants, quand la moyenne nationale se situe à 23.
Au-delà de la santé mentale, les jeunes issus des milieux modestes sont deux fois plus touchés par l’obésité que ceux provenant des familles favorisées. « Ces données révèlent une jeunesse du Nord confrontée à une pression sanitaire cumulée : santé mentale fragilisée, conditions de vie qui favorisent le surpoids et la sédentarité », déplore le Secours populaire.
D’une manière générale, une étude de l’INSEE de juillet 2025 indique que le taux de pauvreté augmente fortement (15,4 %, +0,9 point en un an) et atteint son niveau le plus élevé depuis 1996.
La hausse du taux de pauvreté touche plus particulièrement les familles monoparentales.
Le département, en tant que chef de file des solidarités, doit jouer pleinement son rôle ; il ne doit pas simplement accompagner la pauvreté mais bien tout mettre en œuvre pour l’éradiquer.
Ce budget supplémentaire aurait également pu être l’occasion d’accentuer le soutien aux acteurs associatifs et aux centres sociaux, qui manifestaient dans le cadre d’une journée d’action nationale ce samedi 11 octobre.
Les chiffres récents confirment que la situation budgétaire des associations est inquiétante et poursuit sa dégradation. Selon un avis du CESE de mai 2024 la part des subventions publiques dans les ressources des associations a chuté de 41 % entre 2005 et 2020, passant de 34 % à 20 % et que les subventions pluriannuelles sont remplacées par des financements ponctuels (les appels à projets, les marchés publics…).
Alors que l’INSEE annonce des chiffres records sur la pauvreté, peut-on réduire
la capacité d’agir des associations de solidarités, luttant contre la précarité et les exclusions ?
A l’heure où le dérèglement climatique est remis en cause et où les objectifs de transition
écologique ne sont pas atteints, peut-on faire des économies sur des structures luttant contre le changement climatique et éduquant les citoyen.ne.s aux enjeux environnementaux ?
Par leur présence au quotidien, les associations mettent en œuvre les politiques, prolongent voire accomplissent des services publics et s’y substituent à moindre coût.
Il ne faut pas un euro de moins pour le monde associatif : les associations ne sont pas une variable d’ajustement et les coupes budgétaires doivent cesser. Un sursaut politique en faveur du monde associatif : des actes de confiance et de reconnaissance de la part des pouvoirs publics.
En ce sens, le département du Nord doit agir : bien sûr en revalorisant les aides et subventions, mais aussi en revoyant les calendriers de versements des aides : inconcevable que des associations soient obligées d’attendre l’été pour percevoir les premiers versements de l’année, mettant, de fait, en difficulté de nombreuses structures.
Après le procès Pelicot et la constitutionnalisation du droit à l’avortement,
peut-on se satisfaire de la fermeture des centres d’accueil et de la fragilisation globale des
structures garantissant les droits des femmes ?
C’est pourquoi, nous souhaitons attirer votre attention sur la situation du Planning familial du Nord. Comme beaucoup d’associations, le planning familial du Nord a une situation financière difficile notamment liée à la mise en application de la prime Ségur, rendue obligatoire en Août 2024, qui représente une dépense supplémentaire de 75 000 euros qui n’est à ce jour financée par aucune subvention. Elle a été contrainte à lancer un appel aux dons en juin 2025 car les missions qu’exerce le planning étaient en danger.
Pour rappel, l’association fait notamment de l’accueil et de l’écoute sur la vie affective et sexuelle, elle propose des consultations gynécologiques, de contraception et d’accès à l’avortement. Les consultations sont gratuites et accessibles aux mineures. L’association fait aussi de la prévention avec des interventions en milieu scolaire. Donc des missions en relation directe avec les compétences du département.
Pour en revenir au budget supplémentaire que vous présentez, nous actons les redéploiements entre chapitres budgétaires, au vu de l’exécution à mi-année du budget 2025 même si vous le savez, nous aurions fait d’autres choix initialement. Sur les investissements, nous actons favorablement le versement d’une subvention complémentaire d’équipement au SDIS au titre de l’exercice 2025 de 2 000 000€, soit 4 000 000€ au total sur l’exercice 2025.
Lors du budget primitif, nous avions relayé les besoins criants des pompiers du Nord notamment sur la vétusté de leurs installations. Cet investissement supplémentaire est donc une bonne chose.
Sur le reste, le budget supplémentaire confirme malheureusement les éléments déjà présentés notamment le manque d’ambition et d’anticipation dans les politiques proposées. Face à une situation sociale extrêmement difficile pour les plus modestes, il était urgent de réorienter un certain nombre de choix pour le département du Nord.
Je propose à ma collègue Céline Scavennec de compléter mon propos sur le budget par un point sur l’aménagement du territoire.
Mais vous l’avez bien compris, pour toutes ces raisons, Monsieur le Président, chers collègues, le groupe écologiste EELV-Génération.s votera donc contre ce budget supplémentaire 2025.
— Intervention de Céline Scavennec :
Monsieur le président, chers collègues,
En commission 4 la semaine dernière, Monsieur le VP Siegler a rappelé que le rôle du Département dans l’aménagement du territoire était une “sorte de fierté”, c’est le terme que vous avez employé. Mais cette « fierté » a dû en prendre un coup il y a 2 semaines au Congrès des Maires du Nord à Douai, où nous étions nombreuses et nombreux, membres de cette assemblée, à avoir assisté à l’intervention de la représentante de la Région, Mme Bariseau. En effet, après avoir rappelé la répartition des compétences entre collectivités en matière d’aménagement du territoire, elle a détaillé toutes les aides aux communes versées par la Région, soulignant que la Région c’était la proximité. “Je deviens votre guichet unique” a-t-elle dit en redonnant son 06 que tout le monde a noté.
Moi j’ai noté surtout que cette intervention a eu le don d’agacer le Président du Département du Nord, qui a ensuite bien réchauffé la salle… et ça ce n’est pas une impertinence de la part, c’était un trait d’humour du Préfet.
Plus sérieusement, de quoi on parle ? D’une course à l’échalotte pour savoir qui ouvrira le premier le robinet à subventions pour des projets non priorisés, non accompagnés, non évalués ?
A part ça nous sommes en crise budgétaire, nous sommes aussi en crise sociale et climatique. Nous demandons depuis le début du mandat de remettre à plat les modalités d’attribution des aides ADVB et PTS pour sortir de la logique de guichet.
Je souligne à ce propos que nous avons soutenu les évolutions récentes que vous avez apporté au dispositif avec la mise en place du bonus Nord Durable, mais après plusieurs années on doit faire le constat que ça ne décolle pas : ce bonus Nord Durable représentait 4,2 % des ADVB en 2024, 4,41% cette année donc nous sommes toujours à peu près au même niveau. Et sur les PTS ce % diminue légèrement. C’est bien décevant…
Les temps sont durs et appellent des décisions courageuses.
Finançons d’abord nos priorités, sur nos compétences sociales.
Et si le Département doit encore intervenir en soutien aux communes, cela doit se faire en lien avec nos compétences comme les espaces naturels sensibles ou les déserts médicaux dans la ruralité par exemple.
Par ailleurs, j’ai parlé de “qualifier les projets” et mieux accompagner les communes, je voudrais rappeler que le CAUE mérite plus que jamais toute notre attention : suite à une réforme du recouvrement de la taxe d’aménagement, mal anticipée sans doute, le financement des CAUE est aujourd’hui très fragilisé dans tout notre pays, donc dans le Nord aussi.
Je sais que vous ne portez pas trop cet organisme dans votre coeur, mais de nombreux élus de toutes sensibilités politiques les soutiennent, notamment l’association des maires ruraux de France et l’association des Petites Villes de France. Voilà un moyen d’aider concrètement les communes, en leur permettant de bénéficier d’une ingénierie de qualité.
Allez vous soutenir les CAUE comme il se doit Monsieur le Président ? Et quelle est votre position sur la répartition des rôles en matière d’aménagement du territoire avec la Région ?
Je vous remercie