Budget Primitif 2023 – Intervention générale

Budget Primitif 2023 – Budget Principal Rapport n° DFCG/2023/59

Vote Contre – Interventions de Maël GUIZIOU et Céline SCAVENNEC pour le groupe écologiste Europe Ecologie Les Verts – Génération.S

Maël GUIZIOU – Intervention sur le SDIS :

« Quand je vais dans les casernes, personne ne me parle de soucis ».

 C’est ce qu’on nous avait répondu en conseil départemental quand on demandait des moyens supplémentaires pour le SDIS. À l’évidence, vous avez maintenant compris qu’il y a une demande. Il a fallu des mobilisations musclées des sapeurs-pompiers pour commencer à desserrer l’étau budgétaire.

En effet, à ce stade le BP 2023 prévoit une contribution conforme à la convention financière 2023-2026 (+1,5 M d’euros par an en fonctionnement soit 98,5 M d’euros en 2023, +4M d’euros par an en investissement). 

Cependant, cette contribution est bien insuffisante au regard des besoins (exposés par l’intersyndicale du SDIS) : 

Nous demandons le respect du Règlement opérationnel décliné du SDACR 2020-2024 plutôt qu’un plan de continuité : 

 Arriver à 1842 sapeurs pompiers professionnels opérationnels en intervention, alors que l’on n’arrive même pas à 1718 sapeurs pompiers professionnels actuellement. Il y a donc un minimum besoin d’embaucher 124 sapeurs pompiers professionnels pour l’opérationnel sur 3 ans (nombre d’années pour y arriver est à négocier avec les organisations syndicales). 

Il s’agit, comme l’ont exprimé les sapeurs-pompiers lors de leurs mobilisations, de mettre fin au “mode dégradé” de service, qui remet en cause la qualité de secours, avec des  impacts en termes de santé au travail et de mise en danger des usagers.

Avant la mobilisation des sapeurs-pompiers, le conseil d’administration du SDIS ne s’était engagé qu’à remplacer les départs en retraite. 

Le groupe écologiste continue donc d’appeler à la mise en place d’un plan pluriannuel d’embauche de sapeurs pompiers professionnels, et à adapter la réponse capacitaire du SDIS dans le cadre d’une stratégie de résilience et d’adaptation au changement climatique. 

On ne peut se limiter à en appeler à l’Etat. Pour rappel, le niveau de participation du Département aux recettes réelles de fonctionnement du SDIS (45,7%) est bien loin de la moyenne nationale qui s’établit à 59% pour les conseils départementaux.

Rogner sur les moyens du SDIS, c’est prendre le risque d’un incident opérationnel grave. C’est aussi se retrouver en difficulté si un événement d’ampleur arrivait sur le département. 

La sécheresse que nous vivons est pourtant un rappel que la probabilité de ces événements climatiques adverses va se renforcer, avec un besoin d’un service public d’incendie et de secours fort.

Céline SCAVENNEC – Intervention sur les Investissements :

Monsieur le Président,

Chers collègues,

Je voudrais commencer mon intervention au nom du groupe écologiste sur le Budget 2023 de notre Département, par l’interpellation du Ministre de la Transition écologique et de la cohésion des territoires, Christophe Bechu, début février, à l’attention des collectivités locales : » le climat est un usurier. Tout ce que je ne fais pas aujourd’hui me coûtera plus cher demain ».

 Le gouvernement s’inquiète de la « chute » de l’investissement des collectivités, explique-t-on dans le journal Le Monde du 2 février, soulignant que l’épargne nette des collectivités locales a doublé entre 2019 et 2022. Ce chiffre n’est pas vérifié pour ce qui concerne le Département du Nord, mais il montre une tendance générale à l’attente et la prudence dans laquelle s’inscrit notre Département à travers les différents budgets de ce mandat.

C’est une situation que notre groupe dénonce depuis deux ans, nous n’avons eu de cesse de souligner la faiblesse de notre niveau global d’investissements et votre réticence à recourir davantage à l’emprunt alors que les taux d’intérêt étaient favorables. Même si, en 2023 le montant des investissements s’élève à 354 millions d’euros, soit 17 millions de plus que l’an dernier, avec un recours à l’emprunt légèrement supérieur également (même si cela aurait été plus favorable pour les finances de notre collectivité d’y avoir recours dans les deux années précédentes car les taux remontent cette année et cette progression pourrait se poursuivre, on a loupé le coche en quelques sortes).

Il est cependant intéressant de souligner que cette analyse sur l’insuffisance du niveau d’investissement, est aujourd’hui partagée par un gouvernement plutôt idéologiquement proche de la majorité au Département du Nord.

Le Ministre Christophe Bechu va même plus loin, puisqu’il plaide pour « une forme de « quoi qu’il en coûte » d’investissement », permettant d’engager des dépenses sans épargne ni avance. Au fond, c’est toujours cette idée du tiers investisseur remboursé sur les coûts évités des économies d’énergie sur le long terme, et vu l’augmentation des coûts des énergies, c’est un pari gagnant.

Il est dommage, Monsieur le Président, chers collègues, que le budget 2023 du Département du Nord reste sourd à cet encouragement de l’Etat, reste sourd à l’urgence climatique et ne choisisse pas de s’engager résolument et massivement dans une transition écologique et énergétique qui serait bénéfique à ses finances locales et qui serait bénéfique aux Nordistes.

C’est la première critique d’ordre général que je voulais formuler à l’égard du budget 2023 que vous nous présentez. J’en viens maintenant à des points plus précis :

Si on rentre dans le détail de la nature des investissements à hauteur de 354 millions d’euros, quel montant est consacré à préparer un avenir durable pour les Nordistes ? Quels sont les projets du Département du Nord qui pourraient être éligible au Fonds Vert du Ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires ? Dans le rapport de présentation du budget, il est fait référence (page 28 mais c’est tout à la fin) au courrier que vous avez reçu le 19 janvier 2023 et qui vous informe que ce Fonds vert sert à subventionner des investissements départementaux favorisant la performance environnementale, l’adaptation au changement climatique et l’amélioration du cadre de vie. Même si le montant total précis de l’enveloppe n’est pas connu, j’imagine que depuis le 19 janvier, nous sommes le 20 mars, nous avons la liste des projets retenus au titre de l’année 2023. Je rappelle que c’est ce que je demande depuis la première réunion de la commission Finances de cette année. Je rappelle aussi que mon collègue Charles Beauchamp du groupe communiste s’est associé à cette demande lors du DOB.

En revanche, ce que disent les tableaux budgétaires pour 2023, c’est que le premier poste d’investissement c’est toujours celui des réseaux et infrastructures routières, à hauteur de 98 millions d’euros, devant celui des collèges à 81 millions d’euros. On met encore plus d’argent dans le Nord pour construire des routes au service d’une mobilité non durable.

Il est peu probable que ces choix routiers bénéficient dans les années à venir de subventions d’investissement. C’est d’ailleurs peut-être ce qui coince dans la négociation actuelle du volet « mobilité » du CPER. A l’heure où tous nos efforts doivent être orientés vers l’adaptation de notre territoire à la nouvelle donne climatique, il devient difficile d’afficher trop d’incohérences et de l’assumer politiquement.

Peut-être faudra-t-il réaliser un léger toilettage du PPI, que nous n’avons toujours pas eu le plaisir de consulter, pour l’adapter à une « culture de la recette » qui ne peut que nous orienter vers la Transition écologique. C’est en tout cas clairement le sens du dernier rapport de la Cour des Comptes sur les finances des collectivités locales.

Les recettes :

Ce rapport de la Cour des comptes pointe également un problème souvent évoqué ici à l’occasion des votes des budgets, c’est l’augmentation des dépenses d’action sociale, c’est le cœur même des compétences du Département.

Or les mécanismes historiques de financement des aides individuelles de solidarité ne sont pas adaptés à leur dynamique d’évolution. On le sait bien, cela a été pointé plusieurs fois ici : les compensations de l’Etat sont toujours en décalage avec l’évolution des besoins de la population du Nord, qu’il s’agisse du domaine de la protection de l’enfance, de l’autonomie liée au handicap ou au vieillissement, des allocataires du RSA, etc.

Les recettes du Département du Nord augmentent globalement en 2023, parfois pour de bonnes raisons, parfois pour de mauvaises. Les recettes de TVA par exemple augmentent mais c’est une mauvaise nouvelle parce cela signifie qu’il y a une forte inflation et que l’augmentation du coût de la vie pèse sur les Nordistes. En revanche, quand les recettes sociales augmentent parce la CNSA accompagne les efforts du Département sur l’APA, c’est réellement une bonne nouvelle si elle bénéficie concrètement aux acteurs de l’aide à domicile sur les territoires, ce que nous souhaitons.

Pour le groupe écologiste, les dépenses sociales inscrites au budget 2023, ne nous semblent pas encore à la hauteur des besoins.

– Si nous avions une politique volontariste de lutte contre le non-recours aux aides, phénomène révélateur du décrochage sociétal et de l’isolement de nombreuses personnes en grande précarité et en grande souffrance, nous serions complètement dans notre rôle de justice sociale.

Si nous étions vraiment engagés dans la transition énergétique, nous pourrions y consacrer aussi un budget de fonctionnement pour favoriser son acceptation sociale et accompagner les nordistes qui subissent de plein fouet cette crise sans avoir les moyens de trouver des alternatives.

Mais au lieu de parler de toutes ces réalités de notre temps, qui sont au cœur des réflexions de la Cour des Comptes par exemple, nous avons au Département du Nord une proposition budgétaire présentée dans le même cadre d’analyse, inchangé depuis des années : L’élaboration du budget 2023 s’est faite dans un contexte que vous qualifiez de « particulièrement incertain », donc comme chaque année… Et cette incertitude invite comme toujours à la « prudence » et à la « responsabilité ».

Certes, il faut faire avec les ressources dont nous disposons, il n’y aura pas de grand soir des DMTO ou autre argent magique… Mais « faire avec » ce n’est pas « faire pareil » comme d’habitude. Le budget, ce sont des choix politiques, et tant qu’on ne renonce pas à certains projets anciens, il ne sera pas possible d’envisager d’en développer d’autres. Aucune route nouvelle n’est aujourd’hui indispensable au développement économique de notre territoire. Mais anticiper les conséquences de la nouvelle donne climatique, ça c’est urgent. 

Si je partage le brillant plaidoyer de Valérie Letard hier sur la sobriété foncière et les aménagements de report modal, alors je pose une question pratique : pourquoi faut-il le CSNE, le canal Condé/Pommeroeul ET le doublement de la RN2, ET le doublement de la RD500 ? C’est une curieuse façon d’encourager le report modal…

En revanche, permettre aux acteurs industriels et économiques de se développer sur des territoires résilients, sans crouler sous les coûts d’assurance face aux risques submersions ou inondations, sans crouler sous les coûts de l’énergie, c’est ça le critère qui déterminera de plus en plus dans les années à venir les choix d’implantations des entreprises sur tel ou tel territoire. Permettons à nos territoires d’être attractifs, ne prenons pas davantage de retard sur la transition écologique.

« Tout ce que vous ne faites pas aujourd’hui, vous le paierez plus cher demain… ». C’est un choix qui ne nous convient pas et c’est la raison pour laquelle le groupe écologiste votera contre ce budget.