0.1 – Compte administratif 2024 – Budget principal Rapport n° DFCG/2025/209
Vote contre – Intervention de Laurent Périn
Monsieur le Président,
Monsieur le vice-président,
Cher.es collègues,
Avant toute chose, nous tenons à remercier les agents et agentes du département sur le travail effectué sur l’année budgétaire 2024 et celle en cours. Évidemment, celles et ceux qui ont travaillé concrètement sur la mise en œuvre et le suivi du budget (dans un tel contexte d’incertitude politique et financière, c’est important de le souligner). Mais aussi, l’ensemble des agentes et agents du département qui subissent au quotidien, des budgets de plus en plus contraints, et qui impactent leurs missions et dégradent leurs conditions de travail. Merci sincèrement pour votre engagement pour la solidarité, pour les nordistes.
Pour en revenir au compte administratif 2024, que vous nous présentez, nous considérons qu’il est particulièrement alarmant, même si ce n’est pas une surprise.
Avec des recettes de fonctionnement qui augmentent très légèrement (+5,1 millions de recettes supplémentaires par rapport au compte administratif 2023) et des dépenses qui augmentent fortement ( +61,8 millions d’euros), le résultat 2024 est fortement dégradé. Les raisons sont connues (gels de dotations, perte d’autonomie budgétaire, absence de compensation de décisions nationales…).
- Sur le volet recettes :
Vous indiquez dans votre rapport que “Le CA du Département du Nord témoigne ainsi que les difficultés sont certes imputables à la conjoncture, mais deviennent de plus en plus structurelles, démontrant que le mode de financement n’est plus adapté aux missions départementales”
Nous sommes bien d’accord : C’est sûr qu’avec la suppression de la taxe d’habitation en 2021, le transfert de la part départementale de la taxe sur le foncier bâti au profit du bloc communal, la suppression de la CVAE, suppressions sensées être compensées par une part de TVA ( part aujourd’hui limitée par l’état) difficile d’équilibrer un budget.
Il faut donc revenir sur le modèle économique global de financement des politiques départementales, qui sont des politiques sociales, avec le transfert d’une partie de la fiscalité sociale (avec par exemple l’établissement d’une redevance solidaire sur EHPAD privés lucratifs) et le rétablissement d’une véritable fiscalité locale pour sortir de la politique de dotation de fonctionnement et de transfert d’une fraction de TVA.
Mais là où nous sommes en désaccord, c’est que vous portez également une responsabilité sur le manque de recettes pour le département du Nord. 2 exemples :
En 2021, nous avions demandé d’engager le Département du Nord dans l’expérimentation de la recentralisation du financement du RSA. Vous aviez refusé.
Un rapport parlementaire d’octobre 2024 a estimé un gain net pour le département de Seine Saint Denis (un des 3 départements expérimentateurs) , à 44 millions d’euros en 2023.
Vous aviez aussi la possibilité d’augmenter légèrement le taux de taxe d’aménagement (taux qui je le rappelle est bien inférieur dans le Nord à la moyenne nationale). Nous avions proposé un amendement en début d’année pour le budget 2025. Là encore, vous avez refusé.
Sur la Taxe d’aménagement, en 2024, son produit pour le département du Nord s’élève à 7,1 M€ contre 9,6 M€ en 2023, soit une très nette diminution de 2,5 M€ (soit -25,7%). Vous pointez une baisse qui est à mettre en relation avec les difficultés du secteur du logement neuf . Certes, mais cela n’explique pas tout.
La collecte des taxes d’urbanisme est également entravée par des dysfonctionnements de la plateforme « Gérer mes biens immobiliers » (GMBI) du service de la DGFIP. Ainsi, la grande majorité des avis de paiement, qui devaient être envoyés aux propriétaires devant s’acquitter de cette taxe, ne l’a pas été depuis plus d’un an, presque deux. Selon les estimations, le manque à gagner pour les finances publiques s’élèverait entre 750 millions et un milliard d’euros. Interrogé en commission la semaine dernière, vous indiquiez ne pas avoir d’informations sur le rattrapage de ce retard. C’est particulièrement inquiétant puisque c’est une ressource fiscale indispensable pour financer la politique de protection des espaces naturels sensibles, les conseils d’architecture, d’urbanisme et de l’environnement (CAUE), la gestion de l’eau, et plus globalement nos investissements.
- Sur le volet dépenses:
Vous insistez dans votre rapport sur l’augmentation globale des dépenses réelles de fonctionnement hors dette, qui s’établit à 2% (soit +58,4 M€) entre 2023 et 2024.
Pour autant, nous notons une baisse de dépenses de fonctionnement notables,sur plusieurs politiques notamment :
-23,1% pour les services de prévention santé et -2% sur la prévention et accompagnement à la parentalité. Alors que renforcer les mesures de prévention reste indispensable pour sortir de la gestion de crise permanente,
-4,6% pour la lutte contre les violences intra-familiales, alors que les besoins sur cette politique sont très importants, cette baisse est pour le moins incompréhensible.
– 15,1% pour les dotations de fonctionnement des collèges : sur ce point, c’est considérable et cela semble dépasser ce qui était prévu en matière de baisse coût des fluides ;
-10% sur la culture : cela se confirme d’année en année, des baisses continues, pas de vision à long terme sur la politique mise en œuvre, rien pour défendre l’accès de tous.tes à la culture.
Sur l’insertion et le nombre d’allocataires du RSA, vous indiquez une baisse au 31/12 sur un an, de -0,75% (passage 90 976 à 90 301). Plusieurs remarques : malgré vos efforts considérables en matière de politique de sanctions pour les allocataires RSA, vous êtes loin de la baisse de 3% que vous aviez envisagée/ budgétée pour l’année 2024.
En revanche, une baisse beaucoup plus importante concernant la politique d’insertion sociale et professionnelle (baisse de -7,5%) ce qui est pour le moins contradictoire avec le nombre relativement stable d’allocataires du RSA.
Sur la politique de la protection de l’enfance, nous soulignons positivement l’augmentation 2024,notamment sur l’accueil en établissement et l’accueil familial mais cela reste bien insuffisant au vu des besoins régulièrement exprimés par les travailleurs sociaux ou des magistrats qui ont indiqué que chaque semaine des mesures de placement ne sont pas effectives. Surtout, nous ne voyons pas aujourd’hui, vos démarches pour trouver des solutions à moyen ou long terme à la crise de l’ASE.
Aucune réaction de votre part, suite au rapport parlementaire qui mettait en cause, sur plusieurs points, le département du Nord. Pas de nouvelle feuille de route ASE qui devait être présentée à ce conseil, alors que la crise demeure.
En tout état de cause, la situation financière du département ne peut justifier certains arbitrages défavorables à la protection de l’enfance.
En parlant d’arbitrage ou de choix budgétaires, il en est certains dont vous savez que nous ne les partageons pas : ce sont les choix en matière d’investissements : encore 82M d’euros consacrés à des investissements en voirie (poursuite des travaux du contournement de Valenciennes ; des travaux du doublement de la RD 70, échangeur de Lambres-les Douai…)
Vous vous obstinez à poursuivre, souvent seul, des politiques anachroniques à l’heure du changement climatique et de l’effondrement de la biodiversité. Tout seul à continuer à financer des projets qui participent à l’artificialisation des sols, à l’étalement urbain et à l’augmentation des flux routiers qui dégradent la qualité de l’air et notre santé environnementale. C’est vraiment regrettable.
Enfin, nous déplorons l’absence de l’annexe dit « budget vert », bien que pas encore une obligation légale, le Département du Nord pourrait prendre les devants et présenter ces éléments dès cette année. D’autres départements le font et certains se dotent même d’un budget carbone, une démarche innovante permettant de prévoir les émissions carbones et de travailler une trajectoire ambitieuse de réduction d’émissions de gaz à effet de serre.
Face aux conséquences dramatiques du dérèglement climatique, il est urgent d’agir maintenant car les choix opérés aujourd’hui sont décisifs pour notre avenir et celui de nos enfants.
Ce compte administratif confirme malheureusement les éléments déjà présentés pour le budget primitif et supplémentaire 2024 et notamment le manque de réponses aux urgences actuelles.
En conséquence, Monsieur le Président, chers collègues, le groupe écologiste EELV-Génération.s votera contre ce compte administratif 2024 et par cohérence,contre l’ensemble des documents budgétaires présentés lors de cette séance.