Session du Conseil Départemental du 21 novembre 2022
Soutien au secteur de l’aide à domicile – Rapport n° DA/2022/376
Abstention – Intervention de Céline Scavennec, pour le groupe écologiste
Monsieur le Président, chers collègues,
Cette délibération vise à soutenir le secteur de l’aide à domicile auprès des personnes âgées, secteur très en difficulté dans notre Département, comme l’a mis en évidence la Mission d’Information et d’évaluation sur l’APA.
Disons le clairement d’entrée, Monsieur le Président, pour notre groupe, le compte n’y est pas.
Nous reconnaissons bien évidemment les efforts consentis, efforts financiers importants et conformes à ce que vous aviez annoncés au lendemain de l’adoption en conseil du 26 septembre du Rapport de la MIE sur l’APA : sur le prix horaire de prise en charge, vous aviez promis que le Département apporterait 1€ supplémentaire et que vous obtiendriez 1€ également de l’État.
Défi relevé.
Cependant, nous le savons tous, d’autres efforts étaient attendus par les structures porteuses de services d’aide à domicile :
- Un effort financier d’urgence pour permettre simplement à ces structures de boucler leur budget cette année et combler les retards accumulés, notamment du fait de l’application de l’avenant 43 sur la revalorisation des salaires, dont nous dénonçons la non-compensation par l’Etat. Si ce problème de trésorerie doit être résolu par les « 3€ qualité » (en gros c’est ce qu’on comprend à travers cette délibération) on ne fait que reporter un déséquilibre sur les prochains exercices budgétaires. Or la MIE avait justement vocation à tout remettre à plat, envisager des perspectives à long terme, pour repartir sur des bases saines et poursuivre dans le dialogue l’accompagnement des structures sur tout le territoire du Nord.
- La MIE a notamment mis en évidence, la difficulté de recrutement et de formation dans les métiers de l’aide à domicile. On le sait tous ici, les solutions ne peuvent être immédiates. On ne résoudra pas le problème du manque d’attractivité de ces métiers du jour au lendemain, il faut le temps que les professionnels se forment et il faut mieux rémunérer les personnes qui s’occupent des personnes âgées. Les « 3€ qualité », c’est 3€ supplémentaires, versés par la CNSA, sur le coût horaire pour permettre de financer justement l’amélioration de la « qualité » du service. C’est une aide qui est donc conditionnée à la mise en œuvre d’actions spécifiques, qui auront un coût.
- La MIE a aussi mis en évidence une attente partagée des acteurs auditionnés, aussi bien que des élu.e.s de la Mission d’une poursuite du dialogue dans une gouvernance renouvelée. Là aussi manifestement on est passé à autre chose. Nous voudrions cependant rappeler ici notre totale disponibilité pour y participer dans la durée.
- Le maillage de notre territoire, par des services départementaux remarquables dans les Pôle Autonomie, et par une grande diversité d’acteurs de l’aide à domicile est une richesse, il est à préserver. Mais ce que nous observons aujourd’hui c’est que cette richesse s’amenuise et que la fragilité des acteurs publics ou privés non lucratifs font peser un danger sur l’existence même de services de proximité pour les Nordistes bénéficiaires de l’APA, ou plutôt pour certains publics et dans certains territoires.
En effet : les SAAD publics municipaux, portés par des CCAS par exemple, c’est un modèle qui disparaît progressivement ou qui requiert des financements complémentaires des communes.
Les SAAD privés se développent, leur modèle économique repose sur la vente de prestations complémentaires aux « plans d’aide » validés par les évaluateurs du Département. Ce sont ces prestations qui permettent la rentabilité de la structure. Or on sait que toutes les personnes âgées n’ont pas les moyens d’acheter ces services. On connaît les réalités sociales de notre Département, on connaît le montant du minimum vieillesse et des petites retraites. Et puis, le privé peut aussi toujours choisir ses clients, il peut les choisir dans des villes « rentables » et dans certains territoires, les domiciles éloignés, à la campagne, génèrent des coûts de transport qui font que ces personnes ne seront pas prises en charge.
Alors le secteur privé non lucratif, les SAAD associatifs remplissent bien une mission d’intérêt général et contribuent à lutter contre les inégalités sociales et les inégalités territoriales. Cette mission d’intérêt général, qui dit que toute personne âgée sera prise en charge, quel que soit l’éloignement de son domicile, quelle que soit la complexité de sa dépendance et de ses besoins, quelle que soit sa capacité financière, … cette mission doit absolument être reconnue.
Cette reconnaissance, nous aurions pu la démontrer concrètement en donnant suite à la demande de fonds d’urgence que plusieurs fédérations vous ont transmise.
Cette reconnaissance n’apparaît pas dans cette délibération et c’est bien dommage.
Notre groupe s’abstiendra donc sur cette délibération. Nous saluons les avancées indéniables qu’elle contient et nous vous rappelons, Monsieur le Président, Madame la vice-présidente notre entière disponibilité pour poursuivre la mise en œuvre des recommandations du rapport final de la MIE sur l’APA.
Je vous remercie.