Budget primitif 2025 – Interventions générales

Budget primitif 2025 – Budget principal Rapport n° DFCG/2025/4

Vote contre – Interventions générales de Stéphanie Bocquet et Céline Scavennec

Intervention générale de Céline Scavennec :

Monsieur le Président, 

Je pense qu’il est utile de revenir d’abord sur quelques échanges que nous avons eu ici hier. Nous n’avons aucune difficulté à exprimer des convergences ou des divergences de vue. Il y a même en politique, ce que le philosophe Patrick Viveret appelle « des désaccords féconds ». Mais la caricature et le dénigrement, ça ne grandit personne. 

Pour clore peut-être le sujet avant de profiter ensemble du grand départ du Tour de France : oui nous avons tous ici voté pour la délibération sur le Tour de France, oui il y a des retombées économiques positives de cet événement sur le territoire, cela a été démontré par des économistes du sport. C’est d’ailleurs ce que nous avions dit lors du passage de la flamme olympique, événement qui justement n’avait pas de retombées économiques comme le Tour de France, et dont on a découvert après coup des dépenses supplémentaires. Mais pour évaluer au plus juste ces retombées économiques, pour dire qu’il y a un retour sur investissement de 1€ pour 9, il faut bien savoir combien on investit au départ. C’est tout ce qu’on demande, on veut connaître la mise de départ réelle, incluant les aménagements de routes eventuels, ou prestations diverses liés à cet événement. 

Autre point de nos débat d’hier, j’ai été un peu mal à l’aise des propos de Monsieur le Vice Président Valois à l’égard de notre collègue Valérie Conseil. Donc s’il aime tant Robert Louis Stevenson, je voudrais lui suggérer une lecture moins torturée de l’écrivain écossais, ça s’appelle « En canoë sur les rivières du Nord » et ça raconte son voyage sur la Sambre en 1876 et vous verrez ça va vous apaiser.

J’en viens maintenant au BP 2025 : 

Dans sa présentation introductive d’hier, Monsieur le Vice-Président en charge des Finances a fait référence de manière assez ambiguë à notre rapport à l’Etat. C’est un élément de contexte incontournable cette année, nous en avons déjà parlé hier : tous les départements sont en grande difficulté, l’ADF parle de « l’asphyxie » des départements, et le Premier Ministre nous assure dans un mantra que « la vérité permet d’agir ». 

Alors je voudrais commencer mon propos, chers collègues, par rappeler quelques vérités, même celles qui ne sont pas toujours agréables à entendre : 

D’abord il me semble que vous soutenez ce gouvernement, ce président, ce Premier ministre comme tous les précédents qui nous ont conduit à la situation que nous connaissons aujourd’hui. 

Ensuite vous nous expliquez que (je cite, c’est dans le rapport, mais c’est aussi dans les propos du Vice président aux Fiancés ici même hier) : « les Collectivités locales sont devenues de simples gestionnaires des priorités définies au niveau national. Force est de constater que la situation est bien éloignée de ce que prévoit la charte européenne sur l’autonomie locale, traité de référence pour la sauvegarde des droits des Collectivités, et partiellement violée par l’État français du fait de l’insuffisante possibilité d’évolution des ressources locales. Le Conseil de l’Europe a d’ailleurs rappelé que « les impôts locaux constituent un outil permettant d’opérer des choix politiques afin d’influencer le comportement de la population et des entreprises locales et de favoriser le développement économique local ».

C’est là que je vous trouve ambiguë, mais vous allez nous expliquer : vous regrettez de ne pas pouvoir lever davantage d’impôt locaux, c’est ça ?

Vous déplorez donc, je suppose toutes les baisses ou suppression d’impôts depuis le 1er mandat du président Macron qui empêchent aujourd’hui l’Etat de venir soutenir les départements dans la mise en œuvre des politiques sociales et des services publics.

Ambiguïté aussi, parce que je connais l’admiration de notre Vice-président aux Finances pour le général De Gaulle, et là on nous parle d’une « charte européenne sur l’autonomie locale », de la jurisprudence du Conseil de l’Europe. C’est très bien, moi je suis très pro-européenne, mais quand même, la constitution de 1958 ! La Constitution de la Veme République  : article 34 La loi fixe les règles concernant (…) l’assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toutes natures…

Et article 72.2 Les collectivités territoriales bénéficient de ressources dont elles peuvent disposer librement dans les conditions fixées par la loi.

On ne va pas faire ici du droit constit’ mais il y a toute une jurisprudence du Conseil Constitutionnel qui nous explique qu’il ne faut pas confondre « autonomie fiscale » et « autonomie financière ». Et c’est juridiquement plus robuste que des chartes européennes, non ?

En fait, tout votre discours introductif d’hier sur le contexte traduit surtout une grande fébrilité parce que vous vous êtes trompé : pour financer nos services publics et nos politiques sociales, il faut des impôts et il faut que les plus riches contribuent davantage. C’est cela qu’il faut faire remonter à notre gouvernement, à nos ministres quand vous les rencontrez, si vous voulez des compensations et des dotations à la hauteur de nos besoins, il faut que l’Etat rétablisse les impôts supprimés ces dernières années. Et il faut aussi, sans doute, et cela nous sommes d’accord Monsieur le Président, revenir sur le modèle économique global de financement des politiques départementales, qui sont des politiques sociales, avec le transfert d’une partie de la fiscalité sociale et pas uniquement de la fiscalité territoriale ou une part de TVA. Et, balayons un peu devant notre porte, vous aviez la possibilité d’augmenter légèrement le taux de taxe d’aménagement en votant l’amendement que nous avions proposé au dernier Conseil. 

Vous aviez aussi la possibilité, Monsieur le Président, d’engager le Département du Nord dans l’expérimentation de la recentralisation du financement du RSA, comme nous l’avions demandé en 2021. Je vous invite, ainsi que Madame Descamps qui est intervenue hier à ce sujet, à regarder le très intéressant rapport présenté en octobre dernier par le sénateur du Nord Eric Bocquet et le sénateur LR Arnaud Bazin sur cette expérimentation menée dans 3 départements ; l’Ariège, les Pyrénées orientales et la Seine-Saint-Denis et qui montre que c’est gagnant-gagnant : pour la Seine-Saint Denis le gain net est de 44M€ en 2023. Encore une fois, ne caricaturez pas nos propos : c’est bien le financement du RSA qui est recentralisé, mais le Département reste responsable de la politique d’insertion et de l’accompagnement des bénéficiaires vers le retour à l’emploi. 

Au lieu de cela, le Nord a décidé lorsque les DMTO rapportaient des recettes importantes de réaliser des provisions, et donc depuis 2 ans nous consommons ces provisions. Première remarque : ces provisions ce sont des investissements qui n’ont pas eu lieu ou ont été retardés. 2ème remarque : elles vont bien s’épuiser ces provisions, de combien pourrons-nous encore disposer l’an prochain ? 3eme remarque : manifestement cela n’empêche pas d’avoir à faire des choix cruels.

C’est ce qui arrive dans tous les départements cette année, de droite comme de gauche. 

À la différence près que les choix ne sont pas les mêmes dans tous les départements évidemment. Et les choix que vous nous présentez dans ce budget 2025 nous les contestons. 

Intervention générale de Stéphanie Bocquet :

Oui, tel un refrain, ces mots lors de la séance du Rapport d’orientations budgétaires il y a 3 semaines, Monsieur le Président : « Pas de coupes budgétaires ».

Alors… Un focus, si vous voulez bien, sur les mises en difficulté des associations, des établissements publics, des acteurs partenaires incontournables dans la mise en œuvre de nos politiques départementales.

Quelques exemples :

  • L’enjeu de l’évaluation qualitative de la prise en charge et non pas seulement l’évaluation administrative.
  • La disparité de moyens dans des établissements relevant de la protection de l’enfance ; les établissements publics sont davantage sur les situations d’urgence, laissant les autres profils aux établissements privés : les professionnel.es se trouvent ainsi sur l’accompagnement à court terme et non plus sur le projet de vie de l’enfant, donnant sens à leur engagement.

Ou encore, les postes de psychologues, psychiatres (en unité mobile ou pas) sont souvent ceux qui sautent les 1ers au vu des restrictions budgétaires.

Or, il n’y a pas de santé, sans santé mentale : près d’une personne sur cinq en France est concernée par un trouble psychique ou lié à la santé mentale.

Depuis la crise Covid, qui a mis en lumière le fait que tout le monde pouvait subir des stress dégradant sa santé mentale, la santé mentale est reconnue comme un enjeu prioritaire de santé publique, indissociable de la santé globale et comme un enjeu de société.

La santé mentale : grande cause nationale 2025… après les violences faites aux femmes, l’égalité femme-homme…
On sait ce que ça veut dire depuis 2 quinquennats : aux grandes causes, les petits bilans…

A présent, concernant les personnes âgées :

Entre 2020 et 2023, la part des EHPAD déficitaires est passée de 27 % à 66 % (source DGCS, direction générale de la cohésion sociale).

L’enquête de la Fédération hospitalière de France (FHF) révèle, quant à elle, qu’en 2023, 

84,4 % des établissements enregistrent un résultat déficitaire.

D’une part, il y aurait nécessité de réguler ce secteur, le privé ne payant pas de redevance à l’Etat.

D’autre part, concernant la tarification, nous regrettons qu’il n’y ait pas la possibilité d’augmenter les tarifs applicables aux bénéficiaires sur les volets « hébergement » et « dépendance » dans les EHPAD publics.

En effet, le Département plafonne la tarification alors qu’il faudrait permettre aux EHPAD publics d’augmenter les tarifs pour sortir du rouge, tout en permettant bien-sûr, que l’augmentation soit prise en charge pour celles et ceux qui n’ont pas les moyens de suivre financièrement.

Je parle de celles et ceux qui perçoivent l’aide sociale, et pour lesquel.les le Département doit prendre en charge les frais ; c’est pour cela que vous n’autorisez pas cette possibilité, Monsieur le Président.

Et vous le savez, le privé n’a pas cette contrainte, et a un public qui peut payer.

Or, ne pas faire évoluer les tarifs, c’est répercuter le déficit sur les communes voire, fermer les établissements et baisser ainsi la capacité d’accueil…

Voilà comment on organise la fermeture inéluctable d’EHPAD publics sauf s’il y a compensation par la commune.

Là aussi, combien de temps cela va tenir ?

Revenons votre refrain : « Pas de coupes budgétaires ».

Certes, pas directement… mais il est des ajustements qui ne disent pas leur nom et qui mettent en danger les partenaires.

Que dire de cet avenant qui passera en Commission permanente cette après-midi ?

Oui, cet avenant en annexe 2, de la délibération « Partenariat au titre de l’insertion professionnelle pour les allocataires du RSA et son point 2 sur les ajustements de l’Appel à projets Insertion et Emploi 2022-2025 » : 

On découvre une modification des modalités de calcul et de versements de la subvention, qui posaient déjà questions et difficultés (nous le soulignions alors lors du vote de cet appel à projets).

Pour rappel, les modalités initiales :

  • soit 80% versés presque en fin du premier semestre et 20% en solde avec pénalités calculées en fonction de l’atteinte des résultats en termes d’effectifs accueillis mais aussi du respect des engagements fixés par le département en terme » de contrôle des allocataires « .

L’article 4 de cet avenant porte aujourd’hui modification comme suit :

  • soit 70 % versés au 1er semestre pour l’avance de subvention et 30% maximum versés en 2026 pour le solde prévisionnel de ladite subvention.

Cette modification des modalités de calcul ET de temporalité de versements de la subvention impacte fortement les acteurs de l’accompagnement social et professionnel, et aucun mot dans le corps de la délibération.

Voilà bien un exemple de votre gouvernance, comme nous l’avions souligné il y a 3 semaines dans la question d’actualité, commune aux 3 groupes d’opposition : à savoir une gouvernance jupitérienne à la fois autoritaire et impérieuse.

Le Département modifie ainsi unilatéralement les clauses d’une convention prévue comme triennale.
Les associations sont bien considérées par le Département comme opérateurs prestataires non respectés, assujettis à une conception de l’insertion imposée sans concertation et coopération.

Ces modifications en matière  de  financement et de versement de la subvention fragilisent et insécurisent  l’équilibre de leur budget.

Le sens du politique exige de regarder au-delà du court-terme et ce n’est toujours pas ce que vous faites.

Car on sait que les montants des subventions n’ont pas évolué depuis 3 ans, ne prenant donc pas en compte l’inflation et les coûts salariaux.

Car on sait que les conditions de financement et de conventionnement génèrent des conditions de travail dégradées, de la souffrance professionnelle, de l’anxiété et une perte de confiance dans le dialogue avec le Département.

Tout ceci est déplorable car les associations sont une réelle ressource pour les territoires, pour les Nordistes, particulièrement les plus précaires.


Et concernant les conditions de travail dégradées, concernant la souffrance professionnelle, l’anxiété et de la perte de confiance dans le dialogue avec le Département, je finirai bien-sûr sur les agentes et agents de notre collectivité.

Votre non-réponse à notre QA commune aux 3 groupes d’opposition, le 30 mars dernier ne peut nous satisfaire, notamment concernant votre gouvernance autoritaire et non respectueuse envers les agentes et agents du Département, mais également envers leurs représentantes et représentants : les organisations syndicales, aujourd’hui en intersyndicale.

Concernant le personnel du Département, ce BP 2025 engage l’abaissement des indemnités journalières de 100 à 90% pour les 3 premiers mois en arrêt maladie : ce qui représente une économie budgétaire pour les collectivités employeurs mais bien au détriment du personnel.

Ce BP 2025 engage également l’indemnisation du télétravail au département du Nord (pour rappel, 2,50 € / jour) indemnisation inférieure aux agentes et agents de l’Etat et de nombreuses collectivités territoriales.

Ce n’est guère encourageant, reconnaissez-le.

Monsieur le Président, cher.es collègues, 

Ce budget n’est pas à la hauteur des réalités de notre territoire sur nos compétences obligatoires.

Au vu des interventions que le groupe écologiste a présentées depuis hier, ce sera un vote contre ce BP 2025.

Vote contre, comme tous les budgets annexes qui vont suivre (et ce n’est bien-sûr pas le travail du personnel qui est mis en cause, s’il fallait le préciser, mais bien les orientations de ces budgets, lesquels découlent du vote du BP 2025).

Je vous remercie.

[Budget 2025] Si le président du Département entonne le refrain “pas de coupes budgétaires”, @stephbocquet.bsky.social constate des baisses importantes et la mise en difficulté d’associations et établissements publics, partenaires incontournables du Département, dans plusieurs secteurs.1/3

Groupe écologiste au Département du Nord (@ecolonord.bsky.social) 2025-04-23T08:27:11.649Z

❌ Le groupe @ecolonord.bsky.social votera contre ce budget primitif 2025 du Département du #Nord, qui n’est pas à la hauteur des réalités de notre territoire sur nos compétences obligatoires.3/3

Groupe écologiste au Département du Nord (@ecolonord.bsky.social) 2025-04-23T08:27:11.651Z

[Budget 2025] Si "la vérité permet d'agir" comme nous dit le Premier Ministre, @scavennec.bsky.social rappelle quelques vérités à la majorité départementale qui se plaint du manque de compensation de l'Etat.1/2

Groupe écologiste au Département du Nord (@ecolonord.bsky.social) 2025-04-23T09:08:49.278Z