Motion relative à la mixité sociale dans les collèges du Nord Rapport n° DC/2023/251
Pour – Intervention de Simon Jamelin
Monsieur le Président, Madame la Vice-présidente.
En décembre, l’Éducation nationale a publié les indices de position sociale de tous les établissements scolaires de France. Données réclamées depuis longtemps par les professionnels de l’éducation. Elle ne l’a pas fait de bonne grâce mais contrainte par un recours auprès de la Commission d’Accès aux Documents Administratifs.
Pour mémoire, l’Indice de Position Sociale, l’IPS, compile différentes données, comme la profession des parents, le lieu de vie, ou la surface du logement pour définir la position sociale des élèves. En clair, plus votre indice est élevé, plus vous êtes favorisé.
L’indice de position sociale moyen en France est de 103. Celui du département du Nord de 93. On le voit, les élèves du Nord sont plus pauvres que la moyenne des Français. Nous vous avions alors posé la question suivante :
Quels sont les leviers du Département pour que nous aussi, dans cette institution, nous puissions agir en faveur de la mixité scolaire, pour contribuer à ce que nos élèves aient les mêmes chances de réussite, les mêmes conditions d’apprentissage, peu importe le revenu de leurs parents ?
Quel travail pouvons nous mener sur la carte scolaire pour faire évoluer la sectorisation ?
En janvier, nous avons voté ici le Projet Éducatif Départemental du Collégien, en rappelant que le mode de calcul de la dotation pédagogique est renouvelé chaque année à l’identique. 15 euros par élève et par an. Ce qui relève d’une vision égalitariste de l’éducation, abandonnée par l’éducation nationale elle-même il y a longtemps au profit d’un système compensatoire dans une logique d’équité : donner plus à ceux qui ont moins, pour compenser les inégalités plutôt que les reproduire. Nous vous avons alors proposé une piste de travail : revoir ensemble le mode de calcul de cette dotation pédagogique en passant à un financement progressif par tranches, tenant compte du niveau d’Indice de Position Sociale des établissements, dans une logique de réduction des inégalités entre les collèges
La semaine dernière le sujet de la mixité scolaire est revenu dans l’actualité avec l’annonce en catimini par le Ministre de l’Education Nationale des mesures visant à renforcer la mixité sociale et scolaire dans les établissements publics où les écarts sont les plus marqués. Une deuxième série de mesures concernant l’enseignement privé devrait être présentée le 17 mai. Le ministre a notamment proposé une boîte à outils aux directeurs d’académie et les a invités à créer une instance de dialogue et de pilotage de la mixité sociale et scolaire, à laquelle prendrait part les départements.
Bref, pas de grandes mesures ambitieuses.
Ce que le Gouvernement ne veut pas faire, notre Département peut le faire à travers deux leviers d’action majeurs sur la mixité : la transformation de certains secteurs de la carte scolaire en secteurs multi-collèges et la modulation des dotations pédagogiques des collèges publics et privés en fonction du niveau de mixité sociale des établissements. Ce que nous vous proposons avec cette motion, c’est de nous mettre ensemble autour de la table pour étudier les leviers d’actions du Département du Nord.
D’abord étudier la mise en place d’un “bonus mixité sociale” modulant une partie de la dotation pédagogique des collèges publics et privés en fonction du niveau de mixité sociale des établissements. Si nous entendons les craintes concernant les collèges qui ne sont pas dotés de moyens supplémentaires par l’Etat, le département doit prendre sa part dans la logique de compensation qui permet de réduire les inégalités : donner plus à ceux qui ont moins.
Ensuite, étudier la transformation de certains secteurs de part et d’autre d’une “frontière discriminante” en secteurs multi-collèges. Dans son rapport public annuel 2023, la Cour des comptes indique, concernant la carte scolaire, qu’elle représente un levier pour impulser des dynamiques nouvelles en matière de mixité sociale au collège. Cet instrument demeure toutefois peu mobilisé (…) Face à ce constat, il est nécessaire que s’engage une réflexion plus poussée entre départements et services de l’État, notamment dans les territoires en situation de baisse démographique ou de forte ségrégation scolaire.”
Cette notion de frontières discriminantes, reprise par le Ministre de l’Education Nationale, montre que sur 10 % des secteurs scolaires ayant le taux de pauvreté le plus élevé, un sur cinq borde un secteur dont le taux de pauvreté est trois fois plus faible.
Dans le Nord, plusieurs frontières discriminantes sont repérées : – Collège Lavoisier (Commune : Lambersart – Taux de pauvreté : 8.5 %) VS Collège Claude Lévi Strauss (Commune : Lille – Taux de pauvreté : 25.8 %)
– Collège Rouges Barres (Commune : Marcq-en-Baroeul – Taux de pauvreté : 9.1 %) VS Collège François Rabelais (Commune : Mons-en-Baroeul – Taux de pauvreté : 27.5 %)
– Collège Jules Verne (Commune : Neuville-en-Ferrain – Taux de pauvreté : 5.7 %) VS Collège Mendès France (Commune : Tourcoing – Taux de pauvreté : 32.7 %)
Nous ne suggérons donc pas de réviser entièrement la méthode de sectorisation scolaire, mais plutôt d’accompagner les changements sur des micros territoires, ciblés au préalable, pour agir au plus près des inégalités.
Je vous remercie.
Retrouvez l’ensemble des interventions des groupes politiques sur cette motion : ⤵️